SUR LES TRACES DE DIODATI
Des néons fixés à des faux plafonds en tôle, des portes d’inspiration Second Empire réalisées en 1980, des fenêtres en plastique, des sols inadaptés et, dans les pièces d’eau, un équipement aussi pauvre que disparate.
La liste pourrait encore s’allonger car, à cet aménagement mesquin, s’ajoute l’irrémédiable perte de la typologie d’origine et des éléments de décor intérieur qui ornaient les pièces. Opéré au fil des ans, ce consternant saccage a eu comme théâtre d’opération le quatrième étage et les combles d’un immeuble construit vers 1860 par Charles Gabriel Diodati dans l’élégant périmètre des Tranchées.
Mais alors que le luxe sévère du bâtiment et le standing du quartier ont traversé les générations, comment intervenir dans des espaces aussi mal transformés ?
Restituer un patrimoine disparu
La première opération vise à évacuer les éléments parasites. Nettoyé, décloisonné et libéré de ses revêtements incongrus, l’ancien appartement révèle malheureusement peu de choses de son noble passé. Un minutieux relevé permet néanmoins d’envisager un projet tout à la fois respectueux et adapté aux besoins du Maître de l’ouvrage. Répartie sur deux niveaux, la surface disponible se destine à des activités de bureaux. L’aménagement prévu se veut facile à vivre, plus proche des standards de l’habitation traditionnelle que de l’open space moderne. Le délicat dosage entre la restitution d’un patrimoine disparu et la création d’éléments indispensables au nouvel usage doit donc composer avec l’hétérogénéité des lieux. Simple et neutre, le parti entend reconnecter ces espaces déqualifiés avec le reste de l’immeuble encore très préservé.
Revaloriser le parquet à panneaux
Le plan remanié se concentre autour des noyaux formés par les deux courettes intérieures. Revalorisées, ces dernières offrent des jeux de transparence inattendus et apportent un éclairage naturel jusqu’au cœur des espaces. Lorsqu’elles se trouvent liées aux parois d’origine, les boiseries et les bibliothèques sont traitées de façon classique, alors que les éléments propres au nouvel aménagement – cuisine, salle de bains ou escalier intérieur par exemple – adoptent une expression nettement tranchée, sobre et contemporaine. Sur les traces d’un ancien salon mutilé, la surface réduite du beau parquet à panneaux est assumée pour elle-même, complétée par de grandes lames de pin filant à travers les autres pièces. Neuves, les fenêtres donnant sur l’extérieur sont construites à l’ancienne, avec petit-bois, verres posés à bain de mastic et espagnolettes ; celles tournées sur les courettes sont réalisées en métal mais conservent leur partition originale. Sous une toiture remise à neuf (isolation, calibrage des ouvertures), les combles proposent des surfaces agréables, aménagées autour des pièces maîtresses d’une charpente séculaire.
Une nouvelle identité aux liens inédits
Le traitement général fait naître un climat chaleureux, éloigné des ambiances anonymes qui caractérisent souvent les surfaces dévolues au secteur tertiaire. Cette atmosphère familière s’appuie sur les conseils d’un architecte d’intérieur, portée par une palette chromatique retenue mais franche, une gamme de matériaux limitée, un éclairage précis et subtil. Qu’il s’agisse d’options décoratives d’ensemble ou de simples finitions, les différents choix s’inscrivent avec évidence dans des locaux entièrement rénovés, où les installations techniques (électricité, chauffage, sanitaire, mais aussi isolation thermique et phonique) répondent désormais aux exigences les plus pointues. Un travail efficace et discret qui participe pleinement de la métamorphose de ces bureaux.
Derrière l’élégante façade en molasse du 19e siècle, le projet n’a jamais eu pour ambition de ressusciter le passé. Lisible et cohérent, il offre néanmoins une nouvelle identité aux espaces, tissant des liens inédits avec la substance historique encore en place.
Avant
Après