FERNAND POUILLON ET L'ALGERIE, BATIR A HAUTEUR D'HOMMES

Daphné Bengoa et Leo Fabrizio (CH), respectivement cinéaste et photographes, publient pour la première fois les fruits d’un projet d’envergure mené en commun sur l’œuvre algérienne de l’architecte français Fernand Pouillon (1912-1986). Fernand Pouillon conçoit l’aménagement de l’espace urbain avec pour précepte l’amélioration des conditions de vie de l'homme : lui apporter confort et qualité de vie, et ce quelque soit la destination de ses constructions (habitats d’urgence, logements sociaux, universitaires ou hôteliers). C’est pour l’architecte la seule garantie d’une meilleure intégration des individus au tissu social et culturel. Remettre l’humain au centre, bâtir pour sa dignité et ainsi, peut-être, lui permettre une relation harmonieuse à son environnement. Si ce postulat semble une évidence pour tous, Fernand Pouillon reste néanmoins l’un des rares exemples du XXe siècle à l’avoir véritablement mis en pratique dans l’ensemble de son œuvre, en France comme en Algérie. Bâtisseur effréné, il élabore chaque projet avec une exigence d’efficacité, de rationalité et d’économie de moyens. En parallèle, il étudie, enseigne, écrit et édite un ensemble de travaux relatifs à l’architecture et plus largement, sur la tâche et la responsabilité de l’architecte. Son œuvre bâtie en Algérie - des cités (1953-1958) aux complexes touristiques et logements étudiants (1966-1982) - éclaire particulièrement sa démarche et l’évolution d’une conception singulière de l’architecture sociale. Elle reste néanmoins encore très méconnue du grand public et la création d’un corpus photographique contemporain sur ce volet de son travail est à ce jour inédit. Cet ouvrage présente ce double corpus réalisé en Algérie par les deux artistes avec pour ambition de mettre en lumière la singulière corrélation entre bâtir et habiter dont l’œuvre de Pouillon est exemplaire. Les images racontent la traversée du « dehors au dedans », de la façade et des couches qui la recouvrent autant qu’elles la révèlent (logements sociaux, complexes touristiques, cités universitaires / Leo Fabrizio), jusqu’à ce qu’elle renferme et protège : des milliers de vies ordinaires (les habitants, les travailleurs, les étudiants, les touristes / Daphné Bengoa). L’habitat est le premier enracinement de l’homme, son premier point d’appui à partir duquel il trouve l’élan pour se jeter dans le monde. Habiter, c’est avant tout être de quelque part, à côté d’autres que soi et avec qui il s’agit d’apprendre à vivre. Ainsi, l’architecture imaginée, dessinée et façonnée par des hommes, est un outil à mettre au service d’autres hommes, plus forts et plus fragiles, que la vie a enjoints à s’installer, un jour, en un lieu qui est devenu un « chez soi ». En outre, les éditions Macula ont sollicité la participation de l’écrivaine algérienne Kaouther Adimi en lui proposant d’écrire une nouvelle librement inspirée des images, racontant une histoire d’habitants. Ce texte inédit prendra place au cœur de l’ouvrage et entrera en dialogue avec le corpus photographique. Ce projet fait également l’objet d’une exposition inaugurale aux Rencontres de la photographie d’Arles.

Le photographe Leo Fabrizio (1976) vit et travaille à Lausanne. Son premier livre monographique Bunkers(2004) lui apporte une reconnaissance internationale, avec de nombreuses expositions, notamment la 9eBiennale d’architecture de Venise. Lauréat de prix prestigieux comme les bourses Leenaards (2004) ou le concours Suisse de design (2003, 2006, 2001).
Daphné Bengoa (1981) vit et travaille à Paris comme photographe et cinéaste indépendante. Elle collabore en outre comme commissaire d’exposition et productrice à de nombreux projets culturels.

Graphisme du livre, bureau Schaffter Sahli (CH).

A écouter ☛ https://www.franceculture.fr/emissions/la-conclusion/fernand-pouillon

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